APPRENONS Á NOUS CONNAÎTRE

À quoi s'attendre quand on adopte un chien adulte ? À quoi s'attendre quand on adopte un chien adulte ?

Gabriella Tami Docteure en médecine vétérinaire et détentrice d’un master d’éthologie
Publication: 02/06/23
À quoi s'attendre quand on adopte un chien adulte ?

Si vous envisagez d'ouvrir les portes de votre maison et de votre cœur à un chien adulte sans abri, mais que vous voulez vous assurer que c'est la bonne décision, cet article vous aidera à réfléchir à ce que vous pouvez attendre. Parce qu'en étant adulte, ce qu'il a vécu jusqu'à présent, voire ce qu'il n'a pas vécu, peut laisser une trace sur son attitude et ses attentes vis-à-vis du monde qui l'entoure.
 
Que vous l'ayez trouvé dans la rue, adopté dans un refuge ou même qu'il vienne d'un élevage, un chien peut devenir un formidable compagnon de vie avec qui partager des aventures et des moments inoubliables.

Peu de surprises

Avec un chien adulte, il n'y aura pas de surprises concernant sa taille et ses caractéristiques physiques, et même en ce qui concerne son tempérament. Il y a des traits qui ont tendance à rester stables dans le temps, comme son envie de jouer, son attitude envers les personnes, sa propension à avoir peur1 et même son impulsivité2. Cela ne veut pas dire que son comportement ne peut pas changer3. En fait, plusieurs facteurs peuvent provoquer un changement dans son attitude, tels que l'éducation reçue4, les expériences vécues, en particulier si elles sont traumatisantes, ou simplement le fait de devenir adulte ou de vieillir : par exemple, le niveau d'excitation et d'activité d'un chien a tendance à diminuer à mesure qu'il vieillit5

La stérilisation est un autre facteur qui peut influencer le comportement du chien, en particulier en fonction du moment où l'intervention chirurgicale est réalisée6,7. De plus, il peut parfois y avoir des changements temporaires dans son attitude qui le prédisposent à être plus "optimiste" ou "pessimiste", et à réagir en conséquence8. Par exemple, vivre une série de situations désagréables ou effrayantes, pourrait détourner son attention des bonnes choses et l'ammener à se concentrer sur les dangers potentiels de l'environnement. Cet "état d'esprit" peut le pousser à être plus sur la défensive, même s'il est généralement curieux et audacieux.

Une question de tempérament

Le tempérament fait référence aux tendances comportementales prévisibles et stables dans le temps qu'un chien manifeste dans différentes situations9. Le tempérament est largement le résultat de la génétique et de ses expériences. En particulier, les expériences vécues pendant sa période de chiot et d'adolescence, ont un impact majeur sur le développement de sa perception du monde qui l'entoure10. Même lorsqu'il est encore dans l'utérus, le chien peut être exposé, par l'expérience de sa mère et par la connexion étroite qu'il a avec elle, à des situations qui peuvent influencer de manière cruciale sa manière d'être et de réagir10.

Il n'est plus un chiot

Le "bon côté" d'avoir dépassé la phase de chiot c'est, qu'en plus de ne pas avoir de surprises quant à son apparence physique et son tempérament, dans de nombreux cas, il ne sera plus nécessaire de lui apprendre à faire ses besoins dehors : dans sa "vie antérieure", le chien aurait pu développer une préférence pour uriner et déféquer sur des surfaces spécifiques, comme l'herbe, la terre ou même l'asphalte de la rue. Cependant, il n'est pas surprenant qu'il puisse y avoir des incidents pendant qu'il s'adapte à sa nouvelle maison, famille, routine, quartier, régime alimentaire...11. En effet, uriner ou déféquer à l'intérieur de la maison peut avoir de nombreuses explications, même chez un chien qui sait déjà faire ses besoins dehors : par exemple, souffrir de problèmes de santé, avoir peur de sortir dans la rue, souffrir d'anxiété lorsqu'il est seul à la maison ou être exposé à d'autres situations domestiques12.

En étant adulte, il devrait également avoir laissé derrière lui la phase où les chiots ont tendance à explorer leur environnement avec leur bouche, une tendance qui se termine souvent par des destructions à la maison13. De plus, le niveau d'activité a tendance à diminuer à mesure que le chien devient plus "mature"14: selon la description de son propriétaire, un chien d'un an est généralement assez actif, restant actif pendant plus de 3,5 heures par jour et pratiquant une activité physique assez intense, mais tous ces aspects ont tendance à diminuer avec l'âge14

D'autre part, l'adoption d'un chien qui a dépassé la phase de chiot et d'adolescent, peut devenir un processus "délicat" s'il y a une grande différence entre l'endroit où le chien a été élevé et son nouvel environnement de vie. Par exemple, un chien qui a grandi dans une zone rurale très calme et qui, une fois adulte, a déménagé en plein centre d'une grande ville, pourrait avoir de sérieuses difficultés d'adaptation, réagissant avec peur et comportements défensifs face à des situations qu'il ne connaît pas15. Cela s'est produit avec de nombreux chiots adoptés en plein milieu de la pandémie de Covid-19 et qui, une fois les restrictions sanitaires levées, se sont retrouvés confrontés à une réalité très différente de celle qu'ils avaient connue15

De plus, au cours de ses premiers mois ou années de vie, le chien aurait pu développer des habitudes très différentes de celles que vous avez prévues pour votre nouvelle cohabitation. Par exemple, s'il a vécu dans une maison où on le laissait monter sur le canapé, il pourrait avoir la même attente en voyant un canapé chez vous, même si votre plan pour son repos est un lit confortable au pied du canapé. Il pourrait également avoir des réactions inexplicables à vos yeux, mais qui reflètent son expérience passée. Il faut être clair que ce que le chien a appris jusqu'au moment de son adoption fait partie de lui et représente le point de départ de votre relation.

Avec un "sac à dos" rempli d'expériences

Le préjudice, peut laisser à penser qu'adopter un chien adulte d'un refuge, signifie adopter un chien avec des problèmes de comportement16,17. Et effectivement, certains sont arrivés dans un refuge ou une fourrière en raison de leur comportement. Les raisons les plus courantes citées par ceux qui abandonnent leur chien sont des problèmes liés au fait qu'il fasse ses besoins dans des endroits inappropriée, des épisodes d'agressivité envers les personnes, l'incompatibilité avec d'autres animaux de la famille, des problèmes pour le laisser seul, des destructions à la maison, des nuisances sonores ou une activité excessive18,19,20

Cependant, tous les comportements qui ont motivé un abandon ne sont pas nécessairement anormaux ou nécessitent d'être modifiés : parfois, ce sont simplement des comportements naturels propres à l'espèce que leur ancienne famille n'attendait pas et qui leur sont apparus inacceptables21,22. De plus, de nombreux chiens se retrouvent dans un refuge en raison de circonstances malheureuses. En fait, si l'on analyse les facteurs qui influent sur le succès d'une adoption, le fait que le chien soit un chiot au moment de l'adoption ne garantit pas toujours le succès23: malgré leur facilité à être adoptés, leur éducation peut parfois représenter un véritable défi pour certains adoptants19.

Fin prêt pour de nouvelles relations

Il pourrait vous venir à l'esprit que si le chien est déjà adulte au moment de l'adoption et qu'il a déjà connu plusieurs familles, il ne fait plus confiance aux humains et ne peut pas former de nouveaux liens affectifs avec vous. Rien n'est plus éloigné de la réalité24: le besoin de contact social avec les humains peut même accélérer la formation d'un lien avec sa nouvelle famille. Dans une étude menée avec des chiens de refuge, trois rencontres de 10 minutes chacune, au cours desquelles la personne s'est limitée à parler au chien, le caresser, jouer avec lui et revoir quelques exercices d'éducation, ont été suffisantes pour qu'ils commencent à manifester un traitement spécial envers leur nouveau compagnon humain24


En plein processus d'adaptation 

S'adapter à tous les changements qu'implique une adoption demande du temps. La plupart des changements seront bénéfiques pour le chien, mais ce sont néanmoins des nouveautés à analyser une par une, pour évaluer si elles sont bonnes ou mauvaises. Et comme tous les changements se produisent en même temps, la situation peut devenir stressante pour un chien et il peut passer quelques nuits agitées, surtout s'il est de petite taille25. À mesure qu'il s'habitue, vous remarquerez qu'il dort plus et mieux.

La grande majorité des chiens adoptés semblent s'adapter dès la première semaine, tandis que d'autres continuent de s'adapter tout au long du premier mois26. Et lorsqu'on interroge les adoptants un an plus tard, le pourcentage de chiens parfaitement intégrés dans leur nouvelle réalité est encore plus élevé26

Il existe, de manière anecdotique, une période qui dure quelques semaines après l'adoption (mais sa durée exacte n'est pas décrite27) et qui est parfois appelée la "lune de miel". Pendant cette période, le chien est en plein processus d'adaptation, ce qui peut retarder la découverte de son caractère. Par exemple, le fait qu'un chien nouvellement arrivé ne manifeste pas certains comportements, ne signifie pas qu'il ne les manifestera pas plus tard, comme par exemple aboyer à la sonnette.

Lorsque le changement de vie se produit dans le sens inverse, c'est-à-dire d'une famille à un refuge, le chien traverse également un processus d'adaptation. Au cours de la première semaine, il subit certains changements hormonaux qui accompagnent généralement une réponse au stress, puis sa situation hormonale revient à la normale28,29. Un mois après son arrivée dans le refuge, plusieurs indicateurs physiologiques suggèrent qu'il s'est déjà adapté au changement30.

Il est clair que la rapidité d'adaptation, que ce soit d'une famille à un refuge ou d'un refuge à une famille, peut varier en fonction du tempérament du chien31. L'exposition à un nouvel environnement, le contact avec des personnes inconnues et les changements dans sa structure sociale sont tous des facteurs de stress possibles qui peuvent avoir un impact différent selon le chien.

Bibliographie consulté:

1. Svartberg, K. (2005). A comparison of behaviour in test and in everyday life: evidence of three consistent boldness-related personality traits in dogs. Applied Animal Behaviour Science, 91(1-2), 103-128.
2. Riemer S, Mills DS, Wright H (2014). Impulsive for life? The nature of long-term impulsivity in domestic dogs. Anim Cognition 2014; 17(3): 815–819.
3. Fratkin, J. L., Sinn, D. L., Patall, E. A., & Gosling, S. D. (2013). Personality consistency in dogs: a meta-analysis. PloS one, 8(1), e54907.
4. Kubinyi, E., Turcsán, B., & Miklósi, Á. (2009). Dog and owner demographic characteristics and dog personality trait associations. Behavioural processes, 81(3), 392-401. 
5. Wallis, L. J., Szabó, D., & Kubinyi, E. (2020). Cross-sectional age differences in canine personality traits; influence of breed, sex, previous trauma, and dog obedience tasks. Frontiers in Veterinary Science, 6, 493.
6. McGreevy, P. D., Wilson, B., Starling, M. J., & Serpell, J. A. (2018). Behavioural risks in male dogs with minimal lifetime exposure to gonadal hormones may complicate population-control benefits of desexing. PloS one, 13(5), e0196284.
7. Starling, M., Fawcett, A., Wilson, B., Serpell, J., & McGreevy, P. (2019). Behavioural risks in female dogs with minimal lifetime exposure to gonadal hormones. Plos one, 14(12), e0223709.
8. Mendl, M., Burman, O. H., & Paul, E. S. (2010). An integrative and functional framework for the study of animal emotion and mood. Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences, 277(1696), 2895-2904.
9. Diederich, C., & Giffroy, J. M. (2006). Behavioural testing in dogs: A review of methodology in search for standardisation. Applied Animal Behaviour Science, 97(1), 51-72.
10. Serpell, J., Duffy, D. L., & Jagoe, J. A. (2016). Becoming a dog: early experience and the development of behavior. The domestic dog: Its evolution, behavior and interactions with People, 2nd edition, pp. 93-117.
11. Reider, L. M. (2015). Adopter support: Using postadoption programs to maximize adoption success. Animal behavior for shelter veterinarians and staff, 292-357.
12. Mohan‐Gibbons, H., & Weiss, E. (2015). Behavior risks for relinquishment. Animal behavior for shelter veterinarians and staff, 46-62.
13. Arhant, C., Winkelmann, R., & Troxler, J. (2021). Chewing behaviour in dogs–A survey-based exploratory study. Applied Animal Behaviour Science, 241, 105372.
14. Lee, H., Collins, D., Creevy, K. E., & Promislow, D. E. (2022). Age and physical activity levels in companion dogs: results from the Dog Aging Project. The Journals of Gerontology: Series A, 77(10), 1986-1993.
15. Sacchettino, L., Gatta, C., Chirico, A., Avallone, L., Napolitano, F., & d’Angelo, D. (2023). Puppies Raised during the COVID-19 Lockdown Showed Fearful and Aggressive Behaviors in Adulthood: An Italian Survey. Veterinary Sciences, 10(3), 198.
16. Gazzano, A., Zilocchi, M., Massoni, E., & Mariti, C. (2013). Dogs' features strongly affect people's feelings and behavior toward them. Journal of veterinary behavior, 8(4), 213-220.
17. Mornement, K., Coleman, G., Toukhsati, S., & Bennett, P. (2012). What do current and potential Australian dog owners believe about shelter practices and shelter dogs?. Anthrozoös, 25(4), 457-473.
18. Marston, L. C., Bennett, P. C., & Coleman, G. J. (2004). What happens to shelter dogs? An analysis of data for 1 year from three Australian shelters. Journal of Applied Animal Welfare Science, 7(1), 27-47.
19. Mondelli, F., Prato Previde, E., Verga, M., Levi, D., Magistrelli, S., & Valsecchi, P. (2004). The bond that never developed: adoption and relinquishment of dogs in a rescue shelter. Journal of Applied Animal Welfare Science, 7(4), 253-266.
20. Patronek, G. J., Glickman, L. T., Beck, A. M., McCabe, G. P., & Ecker, C. (1996). Risk factors for relinquishment of dogs to an animal shelter. Journal of the American Veterinary Medical Association, 209, 572–581.
21. Houpt, K. A., Honig, S. U., & Reisner, I. R. (1996). Breaking the human-companion animal bond. Journal of the American Veterinary Medical Association (USA).
22. Kidd, A. H., Kidd, R. M., & George, C. C. (1992). Successful and unsuccessful pet adoptions. Psychological Reports, 70(2), 547-561.
23. Weng, H. Y., Kass, P. H., Hart, L. A., & Chomel, B. B. (2006). Risk factors for unsuccessful dog ownership: An epidemiologic study in Taiwan. Preventive veterinary medicine, 77(1-2), 82-95.
24. Gácsi, M., Topál, J., Miklósi, Á., Dóka, A., & Csányi, V. (2001). Attachment behavior of adult dogs (Canis familiaris) living at rescue centers: forming new bonds. Journal of Comparative Psychology, 115(4), 423.
25. Van der Laan, J. E., Vinke, C. M., van der Borg, J. A. M., & Arndt, S. S. (2021). Restless nights? Nocturnal activity as a useful indicator of adaptability of shelter housed dogs. Applied Animal Behaviour Science, 241, 105377.
26. AHA (American Humane Association), 2013. Keeping Pets (Dogs and Cats) in Homes: A Three-Phase Retention Study. Phase II: Descriptive Study of Post-Adoption Retention in Six Shelters in Three U.S. Cities. American Humane Association, Denver.
27. Scarlett, J., Campagna, M., & Houpt, K. A. (2007). Aggressive behavior in adopted dogs that passed a temperament test. Applied Animal Behaviour Science, 106(1-3), 85-95.
28. Hennessy, M. B., Davis, H. N., Williams, M. T., Mellott, C., & Douglas, C. W. (1997). Plasma cortisol levels of dogs at a county animal shelter. Physiology & behavior, 62(3), 485-490. 
29. Stephen, J. M., & Ledger, R. A. (2006). A longitudinal evaluation of urinary cortisol in kennelled dogs, Canis familiaris. Physiology & Behavior, 87(5), 911-916.
30. Righi, C., Menchetti, L., Orlandi, R., Moscati, L., Mancini, S., & Diverio, S. (2019). Welfare assessment in shelter dogs by using physiological and immunological parameters. Animals, 9(6), 340.
31. Blackwell, E. J., Bodnariu, A., Tyson, J., Bradshaw, J. W. S., & Casey, R. A. (2010). Rapid shaping of behaviour associated with high urinary cortisol in domestic dogs. Applied animal behaviour science, 124(3-4), 113-120.

Partager sur