MON PREMIER CHAT ET MOI

Identifier le sexe d'un chat en fonction de son comportement Identifier le sexe d'un chat en fonction de son comportement

Gabriella Tami Docteure en médecine vétérinaire et détentrice d’un master d’éthologie
Publication: 06/03/24
Identifier le sexe d'un chat en fonction de son comportement

Au-delà de l'apparence physique, peut-on déceler des comportements spécifiques indiquant si un chat est mâle ou femelle ? Si l'observation de la région génitale n'est pas toujours pratique, le comportement de nos chats pourrait bien nous révéler des indices sur leur identité sexuelle. Découvrons tout cela ensemble.

Existe-t-il des différences de comportement ?

Les distinctions de comportement entre mâles et femelles ne sont généralement pas absolues. En d'autres termes, il existe peu de comportements exclusifs à un sexe particulier, mais plutôt des variations dans l'intensité ou la fréquence de certains comportements. Ces différences comportementales, appelées dimorphisme sexuel, sont influencées par l'organisation du cerveau. Décortiquons ces subtilités pour mieux comprendre nos compagnons félins. 


Les différences de
comportement entre
les mâles et les femelles
son davantage liées a
l'intensité ou à la
fréquence de certains
comportements.

À la fin de la gestation, le cerveau des fœtus mâles s'organise sous l'effet de la testostérone, jusqu'à acquérir une "architecture" différente de celle qui caractérise le cerveau des chatons femelles. Ainsi, dès leur plus jeune âge, les chatons mâles et femelles ont tendance à se comporter différemment. Par exemple, les chatons  mâles ont tendance à être plus agressifs que les femelles dans les interactions sociales, bien que ces distinctions puissent diminuer si les femelles sont habituées à jouer avec des chatons mâles1

Les différences de comportement entre les sexes deviennent plus prononcées avec l’arrivée de la puberté, amplifiée par l'augmentation des hormones sexuelles. Ces hormones stimulent divers comportements liés à la reproduction, tels que la parade nuptiale, l'accouplement, la recherche d'un partenaire sexuel, ainsi que des comportements associés à la “compétition” entre les partenaires potentiels.

Les comportements reproductifs des chats et des chattes

Les comportements liés à l'accouplement et à la recherche de partenaire diffèrent considérablement entre les mâles et les femelles. 

Ainsi, au moment de la parade nuptiale et de l'accouplement, il est relativement facile d'identifier le mâle de la femelle. Le mâle se distingue en reniflant les parties génitales de la femelle et en manifestant le réflexe de flehmen, un comportement qui ne se produit jamais dans l'autre sens2. Ce réflexe est facilement identifiable par l'expression faciale du chat, avec la lèvre supérieure relevée et la bouche ouverte pendant quelques secondes. Bien que cela puisse paraître comme une expression de dégoût, le réflexe de flehmen permet au chat d'analyser les phéromones sexuelles de la femelle, déterminant ainsi sa disponibilité pour l'accouplement. Toutefois, en dehors de ce contexte, ce comportement ne s'avère pas très utile pour identifier le sexe du chat, car les mâles et les femelles ont tendance à le manifester lorsqu'ils détectent des sécrétions laissées dans l'environnement par un autre chat.


Le flehmen est un
comportement aisément
reconnaissable à l'expression
faciale du chat : lèvre
supérieure relevée et
bouche ouverte pendant
quelques secondes.

D'autres comportements spécifiques à la parade nuptiale et à l'accouplement varient entre les sexes. Par exemple, la femelle adopte une posture distinctive, arquant son dos et soulevant l'arrière de son corps pour exposer ses organes génitaux. Le mâle, quant à lui, grimpe sur la femelle et la mord à la nuque avant l'accouplement.  À la fin de l'acte, la femelle émet souvent un cri intense et tente de donner quelques coups de griffes au mâle, qui, une fois le danger éloigné, s'assoit généralement près d'elle, mais hors de portée de ses pattes. La femelle, de son côté, commence alors à se rouler par terre.

Pendant la parade nuptiale, les mâles et les femelles émettent également des appels sexuels, ressemblant à des gémissements prolongés, pour attirer un partenaire. Dans le cas du mâle, ces miaulements spéciaux servent aussi à avertir d'éventuels "rivaux" de sa présence et à les éloigner.

La simple observation d'un chat émettant ces sons ne suffit pas à déterminer clairement son sexe. La pratique du marquage urinaire n'est pas non plus un indicateur très fiable, car les mâles et les femelles adoptent la même posture. En période d'accouplement, les deux sexes laissent des traces olfactives dans leur environnement. Cependant, ce comportement est habituellement beaucoup plus fréquent chez les mâles que chez les femelles3. Par conséquent, si l'on observe un chat marquer son territoire avec de l'urine, il est statistiquement plus probable qu'il s'agisse d'un mâle plutôt que  d'une femelle. De plus, la confirmation du sexe mâle peut être obtenue grâce à l'odeur particulièrement âcre de ses marquages urinaires, distincts de ceux d'une femelle ou d'un mâle castré.





En comparaison aux femelles, les chats non stérilisés présentent souvent un comportement plus agressif envers d'autres mâles. Ils ont également tendance à errer, voire à disparaître pendant quelques jours derrière une femelle en chaleur3,4. De leur côté, les femelles non stérilisées se distinguent pendant la saison de reproduction par leurs chaleurs périodiques. Durant cette période, elles deviennent plus affectueuses que d'habitude, se roulent par terre et ont tendance à errer, surtout en présence de prétendants potentiels.

Tendances comportementales chez les mâles et les femelles

Au-delà du comportement reproductif, il n'y a pas de différences évidentes permettant d'identifier le sexe d'un chat uniquement en se basant sur son comportement.  Cependant, certaines recherches suggèrent l'existence de tendances comportementales distinctes entre les deux sexes.

Dans une étude récente, des personnes vivant avec des chats ont été interrogées sur la personnalité de leur compagnon félin. Selon les résultats de l'enquête, les chats mâles ont été perçus comme plus amicaux, plus confiants et plus faciles à éduquer que les femelles. Les participants ont également exprimé un sentiment de proximité émotionnelle plus important avec les chats mâles par rapport aux femelles5. En général, les femelles ont été décrites comme plus distantes et moins tolérantes5.

 

Les tendances sociales des chats semblent également être liées au sexe, comme indiqué dans d'autres recherches6. Cependant, en analysant le comportement de chats castrés d’intérieurs des deux sexes, mené  dans une autre étude, aucune différence significative  n'a été trouvée entre les sexes en ce qui concerne les comportements amicaux ou agressifs7. Une étude très récente a également indiqué l'absence de différences de personnalité entre les sexes8.

En résumé, les différences de comportement et de tempérament semblent être davantage des variations individuelles et ne sont pas très utiles pour déterminer si un chat est mâle ou femelle. Cependant, un aspect du comportement semble être lié au sexe du chat : la tendance à être gaucher ou droitier.

Chats gauchers et chats droitiers

Comme chez l'homme, le chat peut être droitier, gaucher ou ambidextre. À partir de l'âge d'un an, le chat commence à montrer une nette préférence, stable dans le temps, pour l'utilisation de sa patte droite ou gauche lors de l'exécution de tâches, telles que retirer de la nourriture d'un récipient9. Cette préférence ne dépend pas de la tâche à effectuer10 et lorsqu'un chat utilise sa patte "préférée", il est beaucoup plus précis que lorsqu'il utilise sa patte "non dominante"11.


Lorsqu'un chat utilise
sa patte "préférée",
il est beaucoup plus
précis que lorsqu'il
utilise sa patte
"non dominante".

Il est intéressant de noter que le sexe du chat est fortement lié à cette latéralisation dans l'utilisation des pattes : les femelles ont tendance à être plus droitières, tandis que les mâles montrent une préférence pour la patte gauche12. Cette différence semble résulter de l'influence de la testostérone sur le développement cérébral et n'est pas exclusive aux félins. Chez d'autres espèces, y compris la nôtre, des disparités liées au sexe existent dans la dominance entre l'hémisphère droit et gauche13. Cette dominance se traduit ensuite par la préférence d'utiliser une patte plutôt que l'autre. 

Chez les chats, l'utilisation préférentielle de la patte droite ou gauche (et de la latéralisation du cerveau qui en découle) semble également influencer le tempérament de l'individu14. Ainsi, les chats qui montrent une forte préférence pour l'utilisation de l'une des deux pattes sont souvent plus confiants, plus affectueux, plus actifs et plus amicaux que ceux qui n'ont pas de préférence nette pour la patte droite ou de la patte gauche.

Si vous n’arrivez toujours pas à déterminer si votre chat est droitier ou gaucher, une expérience peut vous aider : placez la nourriture préférée de votre chat dans une mangeoire interactive, avec des tunnels ou des espaces étroits. Lorsqu'il essaie d'obtenir de la nourriture sans pouvoir atteindre son museau, votre chat utilisera ses pattes, et la première patte utilisée indiquera généralement sa préférence. Vous pouvez également observer comment il descend les escaliers ou entre dans le bac à litière : la patte "préférée"15 sera souvent la première.


En résumé, les mâles et les femelles ne présentent pas toujours des différences de comportement marquées. Cependant, si vous observez un chat sans détecter de caractéristiques sexuelles distinctives sur le plan physique ou génital, certaines variations comportementales peuvent vous donner des indices pour déceler si vous faites face à un mâle ou une femelle.

Bibliographie consultée :

1. Caro TM, 1981. Sex differences in the termination of social play in cats. Animal Behavior 29, 271–279. 

2. Hart BL, Leedy MG, 1987. Stimulus and hormonal determinants of flehmen behavior in cats. Hormones and Behavior 21(1), 44-52.

3. Hart BL, 1974. Normal behavior and behavioral problems associated with sexual function, urination, and defaecation. Veterinary Clinics of North America 4, 589-606.

4. Hart BL, Eckstein RA, 1997. The role of gonadal hormones in the occurrence of objectionable behaviours in dogs and cats. Applied Animal Behaviour Science, 52(3-4), 331-344.

5. González-Ramírez MT, Landero-Hernández R, 2022. Cat Coat Color, Personality Traits and the Cat-Owner Relationship Scale: A Study with Cat Owners in Mexico. Animals, 12(8), 1030.

6. Menchetti L, Calipari S, Guelfi G, Catanzaro A, Diverio S, 2018. My dog is not my cat: Owner perception of the personalities of dogs and cats living in the same household. Animals, 8(6), 80.

7. Barry KJ, Crowell-Davis SL, 1999. Gender differences in the social behavior of the neutered indoor-only domestic cat. Applied Animal Behaviour Science, 64(3), 193-211.

8. Leech LE, Preziosi R, Stoycheva R, Pastorino GQ, 2022. The effects of owner and domestic cat (Felis catus) demographics on cat personality traits. Applied Animal Behaviour Science, 248, 105570.

9. Wells DL, Millsop S, 2012. The ontogenesis of lateralizaed behaviour in th e domestic cat, Felis silvestris catus. Journal of Comparative Psychology 126(1), 23.

10. Isparta S, Demirbas YS, Bars Z., Kul BC, Güntürkün O, Ocklenburg S, Pereira GDG, 2020. The relationship between problem-solving ability and laterality in cats. Behavioural Brain Research, 391, 112691.
 
11. Fabre-Thorpe M, Fagot J, Lorincz E, Levesque F, Vauclair J, 1993. Laterality in cats: paw preference and performance in a visuomotor activity. Cortex, 29(1), 15-24.

12. Tan Ü, Kutlu NP, 1991. The distribution of paw preference in right-, left-, and mixed pawed male and female cats: The role of a female right-shift factor in handedness. International Journal of Neuroscience, 59(4), 219-229.

13. Wisniewski AB, 1998. Sexually-dimorphic patterns of cortical asymmetry, and the role for sex steroid hormones in determining cortical patterns of lateralization. Psychoneuroendocrinology, 23(5), 519-547.

14. McDowell LJ, Wells DL, Hepper PG, Dempster M, 2016. Lateral bias and temperament in the domestic cat (Felis silvestris). Journal of Comparative Psychology, 130(4), 313.
 
15. McDowell LJ, Wells DL, Hepper PG, 2018. Lateralization of spontaneous behaviours in the domestic cat, Felis silvestris. Animal behaviour, 135, 37-43.

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